• Radio 16 Only Jazz

    Cette semaine, dans « Onlyjazz », c’est avec un réel plaisir que nous retrouvons l’excellent pianiste Mico Nissim qui nous gratifie d’un album solo particulièrement abouti…

    Et s’il l’intitule « Traces » c’est sans doute pour nous faire toucher du doigt l’éclectisme musical qui anime celui qui, depuis ses débuts, développe une écriture à la fois singulière et nourrie d’influences multiples parmi lesquelles le jazz figure toujours en bonne place.

    Il nous balade ainsi dans son univers musical où se côtoient neuf compositions personnelles et deux adaptations puisées pour l’une dans le répertoire de Gabriel Fauré et pour l’autre sur « L’île de ré » de Nougaro qu’il ré-harmonise avec brio.

    On comprend très vite que Mico Nissim profite de son expérience de pianiste dans des registres bien différents pour écrire et composer dans un style qui lui est propre.

    Sa musique est riche, emplie de douceur, parfois teintée d’une certaine mélancolie et bien qu’écrite avec application, toujours ouverte à l’improvisation.

    Enregistré et mixé durant l’hiver 2020, peu de temps avant la période de confinement sur le Steinway de son frère Léo, « Traces » est certainement le témoignage d’un musicien qui, sans vraiment commencer à regarder derrière lui, analyse le chemin parcouru au fil d’une carrière qui s’égrène depuis 40 ans, le renvoyant à des moments marquants ou autres souvenirs musicaux.

    Des ambiances à géométrie variables nous font voyager tantôt avec délicatesse, parfois sur des histoires dont quelques notes savamment dosées nous font apprécier la mélancolie ou encore sur des thèmes exécutés avec finesse et fluidité.

    En nous proposant un album intimiste où il donne l’impression de laisser quelques traces, Mico Nissim nous offre avant tout un album témoignant d’une maturité musicale et d’un bagage technique lui permettant aujourd’hui d’aborder la musique en jouant habilement avec les mélodies.

    En signant ici son 11ème album sur le label Trois Quatre qu’il a lui-même créé, Mico Nissim s’impose comme un artiste aux multiples facettes dont les compositions, d’où se dégage une réelle sérénité, méritent qu’on y consacre une écoute attentive.

    Autant de traces entre nostalgie et optimisme pour un disque qui constitue, au final, bien autre chose qu’un album souvenir…

     

    « Traces », le nouvel album solo du pianiste Mico Nissim, sorti dernièrement sur le label Trois Quatre

     

     

  • Souffle Bleu : Des nouveautés en jazz de cette année

    souffle-bleuQue faire de la tradition ? Ou comment rendre la mémoire vivante.

    Mico Nissim est pianiste mais aussi compositeur et enseignant. La tradition, il la connaît, la fréquente tous les jours. Les jeunes gens et filles qui se lancent dans le jazz aujourd’hui doivent l’apprendre. Il faut savoir copier pour se trouver soi-même. Il faut bien choisir ses mentors et viser le plus haut possible. Le jazz s’apprend en écoutant. C’est sa part d’oralité.
    Connaître, apprécier le jazz, ses traditions est une nécessité. Le jazz est mémoire et s’en sert pour échapper à la répétition.
    Notre vie, comme l’écrivait Borges que cite le pianiste, ressemble à un labyrinthe a posteriori. Les routes se sont enchevêtrées. Nos choix, nos pas dessinent des territoires réels et virtuels dans lesquels nous nous perdons facilement. Se retrouver est difficile, le chemin n’est pas linéaire. C’est une manière de se surprendre, de refuser de « suivre les chemins qui ne mènent pas à Rome » comme le chantait Brassens justement. 

    Mico Nissim a voulu se perdre dans sa mémoire, dans la tradition du jazz qu’il voudrait bousculer à l’aide d’un guide, Thelonious Monk en l’occurrence. Il en est de pire. « Labyrinthe quartet », ainsi se nomme son groupe, devient tout un programme. Une sorte de projection de cette filiation qui unit Nissim et Monk, le compositeur le plus borgésien qui soit, et la volonté d’être soi-même. Réunir un vibraphone, Stephan Caracci virtuose de ce curieux instrument, une contrebasse qui se fait basse électrique dans un hommage à Monk, Jean-Luc Ponthieux et une batterie, Mourad Benhammou qui sait tout de cet instrument emblématique du jazz, était un pari qui n’avait rien de pascalien. L’alchimie opère dans cet enregistrement réalisé en public. Pas toujours, ce serait trop. Mais souvent. « Labyrinthes et autres routes » indique une direction, celle d’une rencontre entre toutes les traditions qui nous font devenir un être humain avec le goût de la fraternité.
    Il faut découvrir cette musique qui entraîne l’auditeur dans des sphères où il fera connaissance avec cette inquiétante familiarité dont parle Freud. Les compostions ne heurtent pas l’auditeur dans un premier temps mais elles interrogent sur la construction d’une mémoire de l’avenir.
    Nicolas Béniès.

    « Labyrinthes et autres routes », Mico Nissim, Labyrinthe quartet, Trois Quatre/Absilone/Socadisc.

    http://soufflebleu.fr/?p=1994